Le Mag avait eu la chance de rencontrer Nadia Maazouzi, référente handicap et initiatrice de la formation adaptée du CFA Médéric, Passerelle, lors de la réalisation du livre Restaurants extraordinaires. Cette année, l’école hôtelière de renom accueille sa sixième promotion. L’occasion pour nous de revenir sur l’histoire et les perspectives, nombreuses et enthousiasmantes, de ce séduisant projet.
Interview réalisée le 8 décembre 22
**Interview**
La conviction de Nadia Maazouzi
À l’origine, la classe Passerelle du CFA Médéric est née d’une conviction, celle de Nadia Maazouzi, que l’établissement spécialisé dans les domaines de l’hôtellerie, la restauration et l’alimentation, avait un rôle à jouer dans la formation des personnes en situation de handicap mental. Si de nombreux élèves en situation de handicap sont accueillis dans les filières classiques de l’établissement, il n’existait pour autant pas de dispositif adapté.
Convaincre son supérieur, Jean-François Tostivint, ne fut pas si compliqué. Malgré son passé de restaurateur, où l’emploi de personnes porteuses de handicap mental était rarissime, le directeur adjoint n’a pas hésité à donner carte blanche à sa collaboratrice. Aujourd’hui, il est le premier à reconnaître que son regard a changé et que cette classe est un atout pour ces jeunes et pour l’ensemble de l’école.
Fierté de l’établissement parisien, l’initiative fait aujourd’hui partie intégrante de son ADN.
« Si elle contribue à la bonne marche de la société, comme le souligne Nadia Maazouzi, elle apporte des solutions professionnelles reconnues aux jeunes apprentis et aux futurs managers et une expérience d’inclusion unique à l’ensemble des apprentis du CFA Médéric. »
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« Je veux être quelqu’un ! »
Nadia Maazouzi aime à citer ce jeune apprenti, qui, interrogé par une journaliste sur ses projets professionnels avait simplement répondu : « Je veux devenir quelqu’un ! ». Compter pour la société, avoir sa place dans le milieu ordinaire, c’est ce pour quoi elle se bat. La formation est entièrement orientée vers leurs capacités techniques. Souvent peu performants en apprentissages scolaires, les apprentis sont majoritairement formés sur les pratiques et techniques. Ils deviendront serveurs ou cuisiniers sans avoir à passer par la théorie.
Au programme, un enseignement gratuit, financé grâce à un partenariat fort avec l’Agefiph*, deux jours en labo à l’école, en service ou en cuisine, en inclusion avec les autres classes, et deux jours en entreprise, dans le cadre de stages avec gratification. Les apprenants sont formés en entreprise auprès de nombreux partenaires du CFA, parmi lesquels on compte des ministères, Matignon, de grands groupes de restauration comme le Fouquet’s, mais également des restaurants inclusifs membres des brigades extraordinaires comme Le Reflet Paris. Ils sont rattachés à un établissement spécialisé, comme une ULIS ou un IME, où ils passent la dernière journée de la semaine.
Une vraie passerelle
À date, la Passerelle du CFA Médéric a formé plus de soixante jeunes aux métiers de la restauration. Que font-ils une fois riches de ces enseignements techniques et professionnels ? Les orientations sont nombreuses : du CDI en milieu ordinaire à l’emploi en ESAT ou une poursuite de formation vers un titre professionnel ou un CAP, chacun poursuit son parcours de vie.
Parmi les employeurs demandeurs de ces profils, on compte le groupe Yannick Alléno, parrain de la classe Passerelle avec cinq embauches, Le Reflet Paris avec trois emplois en CDI, La Belle étincelle, Le Péninsula, etc. Nadia Maazouzi reconnaît que la restauration traditionnelle évolue rapidement et que les brasseries de la nouvelle garde commencent à s’intéresser à l’emploi des personnes en situation de handicap. Pour autant, « cela ne va pas assez vite pour moi ! », souligne-t-elle.
D’autres écoles s’y mettent
Après plus de cinq années à démontrer son succès, la classe adaptée inspire d’autres initiatives en France et à l’étranger. Ainsi, l’école est régulièrement sollicitée pour partager son expérience. Ce fut le cas en Bourgogne, au Maroc ou dans de grands groupes souhaitant créer leur propre formation. Le Mag suivra de près ces projets et ne manquera pas de vous tenir informés !
La grande nouvelle pour la Passerelle viendra avec le déploiement du CFA dans les nouveaux locaux du Campus Médéric qui permettra de renforcer l’offre aux publics en situation de handicap mental. Très fortement soutenu par le GNI (Groupement National des Indépendants) et son président Didier Chenet, le nouveau campus accueillera un hôtel d’application et permettra d’allouer plus de moyens et de locaux au dispositif. Nadia Maazouzi étudie même la création de formations vers de nouveaux métiers…
Pour les Parisiens qui nous suivent, notez que le restaurant d’application du CFA Médéric est ouvert aux publics extérieurs toute l’année scolaire sur réservation.
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* L’Agefiph (Association de Gestion du Fonds pour l’Insertion Professionnelle des Personnes Handicapées) gère le fonds pour favoriser l’accès et le maintien dans l’emploi des personnes handicapées, en milieu ordinaire de travail, dans les entreprises privées.
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